En 1974, une nouvelle ère commençait chez Porsche. En même temps que BMW et sa 2002 Turbo, la première 911 de série équipée d'un moteur turbocompressé faisait son apparition. Son nom : 911 "Turbo", ou "930" pour les intimes. Mais contrairement à la BMW, qui resta sans descendance, la Porsche 911 Turbo sera l'initiatrice d'une grande lignée. 50 ans après, revenons sur cette véritable légende automobile.
La marque a toujours offert à ses clients une série spéciale de modèles aptes à… la course et la 911 a confirmé à plusieurs reprises cette règle. Dans cette logique, la 911 Turbo fut d'abord présentée sous la forme d'un prototype au salon de Paris en septembre 1973 comme un véhicule pouvant être produit en petite série pour l'homologation en Groupe 5 de la FIA. Entre temps, une Porsche 911 Carrera RSR Turbo développant près de 500 chevaux (pour 2.1L de cylindrée!) fut engagée au Mans et donna des résultats encourageants en terminant 2ème en 1974. Cette performance incita Porsche à continuer ses recherches dans l'utilisation du turbocompresseur et ce fut donc un véritable évènement lorsque la 911 Turbo de route fut présentée à Paris dans sa forme quasi définitive, quelques mois plus tard. Instantanément, ce fut le coup de foudre pour de nombreux passionnés et le début d'une longue et belle histoire d'amour.
La désignation usine "930" correspondant à la nomenclature du moteur deviendra rapidement le nom de baptême de la 911 à moteur turbocompressé auprès des Porschistes, même si son appellation commerciale officielle a toujours été "Turbo" et "Carrera Turbo" aux USA. A l'origine, il n'était alors prévu de fabriquer que les 500 exemplaires nécessaires à l'homologation du Groupe 5 de la FIA, étant donné le contexte économique de crise pétrolière peu favorable aux véhicules énergivores. Pourtant, c’est en Février 1975 que débute la production de la célèbre 911 Turbo alors que la France vient d'imposer les limitations de vitesse sur autoroute. Mais malgré cela, la 911 Turbo suscite un tel intérêt et constitue un évènement si exceptionnel que les commandes affluent rapidement au-delà des espérances de vente. Devant l'enthousiasme, la production sera augmentée dès l'année suivante. Extérieurement, la 930 garde l'allure générale des 911 mais se distingue tout d'abord par son large aileron arrière proéminent qui assure une déportance supérieure aux vitesses les plus élevées, en combinaison avec le becquet avant. Au premier regard, la Porsche 930 impressionne, puis ensuite, elle séduit, notamment par ses ailes arrière gonflées. En effet, les voies de la Turbo sont élargies de 60 mm devant et 120 mm derrière. L'ensemble fait son effet et beaucoup tomberont amoureux de ces hanches larges et sexy qui deviendront ensuite une option très prisée composant le fameux "Turbo look". Comme c'était déjà le cas pour la 911 Carrera RS 3.0 de 1974, la Porsche 911 Turbo reçoit en série les jantes Fuchs noires à bord poli de 7 pouces à l'avant et 8 pouces à l'arrière. Les pneus sont de dimensions généreuses pour l'époque.
A l'occasion du millésime 76, plusieurs autres modifications vont être apportées à la 930 qui connait un succès grandissant. Des sabots noir mat sur l'avant des ailes arrière protègent désormais des projections de gravillons. Moins visible, mais très importante, l'électrolyse au zinc de la caisse permet à Porsche de garantir la 930 contre la corrosion pendant 6 ans.
Intérieurement, en dehors du volant 3 branches spécifique, l'habitacle de la 911 Turbo est rigoureusement identique à celui d'une Carrera. On s'étonne même de ne voir aucun manomètre de pression du turbo jusqu'au millésime 77. Mais étonnamment, Porsche a souhaité positionner sa nouvelle sportive dans un créneau différent de celui d'une voiture de sport pure et dure, dépouillée à l'extrême comme pouvait l'être la Carrera RS 2.7L. De série, l'équipement est même plus complet que lors de la présentation et très luxueux pour l'époque: vitres électriques, air conditionné, sièges en cuir, vitres teintées, sans oublier les lave-phares - une première mondiale ! - un essuie-glace arrière, des antibrouillards avant, etc... Notez aussi que parmi les options disponibles sur la 930, on trouvait le chauffage des sièges avant, un différentiel autobloquant, un kit levier de vitesse court, des sièges sport réglables en hauteur électriquement et le pare-brise teinté dégradé. Pourtant, la 930 est bien réellement une authentique sportive. Et pour s'en convaincre il faut goûter à ce qu'il y a sous son imposant capot moteur !
Destiné à être une voiture de course, le modèle leader de la série 911 était donc entièrement axé sur la puissance et allait instaurer de nouvelles normes. Pour comprendre le choix du moteur de la Porsche 930, il faut se rappeler que les règlements sportifs de l'époque avaient imposé un facteur 1,4 applicable à la cylindrée des moteurs turbocompressés afin de compenser leur avantage mécanique face aux moteurs atmosphériques. Dès lors, une cylindrée de 3L correspondait à 4,2L soit le maximum autorisé à l'époque avec un poids limite de 1210 Kg. Conçu pour la compétition, le Flat 6 de la 930, type 930/50, est donc dérivé de la Carrera RS 3 litres. La cylindrée est de 2994 cm3 (alésage 95 mm, course 70,4 mm) et le moteur est alimenté par une injection mécanique Bosch K-Jetronic et un turbocompresseur KKK type 3LDZ, soufflant à 0.8 bar. Le taux de compression est abaissé à 6,5:1. Porsche utilise également des technologies avant-gardistes destinées à obtenir une forte puissance sans que la fiabilité du moteur n'en soit affectée. Les parois des cylindres sont couvertes de Nikasil, les pistons sont en alliage forgé et le carter de vilebrequin en aluminium. Le 6 cylindres à plat Porsche développe ainsi la puissance de 260 ch à 5500 tr/mn et un couple de 343 Nm à 4000 tr/mn. Disponible aux USA, la 930 n'y délivrera cependant que 245 ch (moteur type 930/51) soit 15 ch de moins que la version européenne pour des raisons de dépollution. Mais le couple est tel que c’est bien suffisant !
Offrant des performances de premier ordre, la Porsche 930 se classe au niveau des meilleures sportives de l'époque comme la Ferrari 512 BB. Pour passer de 0 à 100 Km/h, 5,5 secondes lui suffisent, tandis que sa vitesse maximale dépasse les 250 Km/h.
En dépit de caractéristiques dignes d'une voiture de compétition, la Turbo 911 semble étonnamment adaptée pour une utilisation au quotidien. Dans ce domaine, Porsche parvient également à concilier 2 contradictions pourtant flagrantes. En ville, la Turbo se conduit comme une 911 ordinaire, la souplesse du moteur 3.0L étant ici très appréciable. Une fois sur la route, il faut alors anticiper la double personnalité d'une voiture dont la gestion du turbo à l'ancienne avait de surcroit été voulue à l'époque volontairement "brutale". En clair, on a rien fait pour lisser le caractère du moteur ! Et en effet, une fois passé les 3500 tr/mn, le déclenchement de la turbine s'opère en mode "tout ou rien". Le 6 cylindres de la Porsche 930 vous propulse alors dans une autre dimension, avec un mémorable coup de pied au cul ! Le dos s'enfonce alors dans le cuir du siège et l'on prend pleinement conscience des accélérations fulgurantes de la 930 Turbo ! Imaginez alors un peu quel choc ce fut à l'époque pour le monde de l'automobile qui découvrait alors simultanément la turbo compression et l'arrivée sur le marché d'une voiture de sport capable d'offrir des sensations jusqu'ici inconnues en dehors du monde de la compétition. Etant donné le couple du moteur, la boîte de vitesse à 4 rapports semble suffire. La 1ère pousse jusqu'à 80 km/h à l'abord de la zone rouge (située à 6900 tr/mn), la 2ème à 135 et la 3ème fait déjà de vous un délinquant bon pour la prison, à 200 km/h. Vous irez ensuite expliquer à M. le "gendarme" que vous n'aviez pas encore passé la 4ème... il risque d'apprécier. Imaginez tout de même que la 4ème vous emmène à 250 km/h...
En un mot, la Porsche 930 c'est... sportif ! Et comme c'est bon ! Ce retour aux sources vivifiant nous rappelle combien les productions actuelles sont parfois bien trop aseptisées.
Pour de nombreux conducteurs, la 911 Turbo représentait la voiture de sport par excellence. Au regard de toutes ses caractéristiques exceptionnelles, elle constitue aujourd'hui un véritable phénomène et un monument historique de l'Automobile. Un véhicule mythique dont la réputation de bête sauvage a beaucoup contribué à l'aura dont elle bénéficie encore dans le coeur de tous les passionnés.
Cet exemplaire a été commandé le 27 février 1976, spécifié en Schwarz avec cuir Braunbeige, un toit ouvrant électrique, et destiné à la Californie, selon la fiche de construction d'usine qui l'accompagne. Le numéro de châssis 00413 aurait été conservé par son premier propriétaire pendant 23 ans avant d'être vendu localement en 1999. Il aurait ensuite été vendu à un troisième propriétaire californien en 2002, avant d'être exporté en Norvège en 2007 et de trouver refuge chez un autre Norvégien quatre ans plus tard. En 2015, elle est passée aux mains du précèdent propriétaire et a été importée au Danemark, où, plus tard dans l'année, elle a subi une remise en peinture de la carrosserie en noir. Un certificat d'authenticité de Porsche confirme que cette voiture a conservé son châssis et son moteur.
Magnifiquement présentée dans sa configuration d'origine, cette Turbo Carrera de première génération est un bel exemple d'un modèle emblématique, qui a marqué à la fois le développement de la 911 et l'évolution de la supercar.
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