A quoi correspond la version sportive d’une berline sportive ? A une voiture de course, cela va sans dire. C’est exactement ce qu’est la Giulia Ti Super, qui reprend les qualités de la 1900 Ti Super en poussant le concept à l’extrême : carrosserie allégée, moteur vitaminé, châssis surbaissé plus rigide et 189 km/h de vitesse de pointe. Construite à seulement 501 unités sur deux années, la plus désirée – et falsifiée ! – des Giulia se fait aujourd’hui extrêmement rare. Nous avons déniché l’un des exemplaires authentiques encore en circulation. C’est sous son nom italien, Quadrifoglio, que la ti… super va être universellement connue. En paraphrasant ce qu’Heny Ford disait à propos de la Model T : la Giulia Ti Super était livrée dans n’importe quelle couleur, pourvu que ce soit blanc. Des 501 unités produites, seules deux arboraient une autre teinte : la *595135* rouge, et la *595416* grise. Il faut se plonger dans la nomenclature des Alfa Romeo des Trente Glorieuses pour mieux comprendre la spécificité de cette auto. Si le terme “Super” désigne une version cossue et “Ti” (Turismo internazionale) une sportive, quelle est donc la signification de “Ti Super” ? Un modèle de luxe avec un moteur dopé ? Perdu ! Dans le cas présent, “Super” n’indique pas un niveau de finition, mais vient renforcer le côté sportif suggéré par le sigle Ti. Une “super sportive” en somme. La 1900, dont la Super comptait 90 ch et les Ti 100 et Ti Super 115 ch, avait déjà été déclinée ainsi. Au lancement de la Giulia, le 27 juin 1962, Alfa Romeo comprend qu’elle dispose là d’un atout très intéressant pour souligner l’idée de “la berline familiale qui gagne les courses”, slogan qui avait accompagné, non sans succès, la sortie de la 1900. Plus puissante que la Giulietta, largement plus agile que la 2600 à 6 cylindres ayant indirectement pris la relève de la 1900, la Giulia est faite pour séduire avec sa ligne originale et aérodynamique bien en avance sur une concurrence qui, au mieux, s’inspire des américaines, à l’image de Fiat et de ses 1300/1500. Le 24 avril 1963, Alfa Romeo ajoute donc du piment à sa recette en dévoilant, sur l’autodrome de Monza, la Ti Super.
Son moteur est à peu près identique à celui qui équipe la Giulia SS, la version 1,6 litre de l’ancienne Giulietta SS dessinée et produite par Bertone. Malgré une alimentation légèrement différente, il délivrera la même puissance que le coupé, à savoir 113 ch, contre les 90 de la Giulia Ti. Pensée pour une clientèle véritablement sportive qui entend l’engager en compétition plus que pour des bourgeois empressés, la nouvelle venue reprend le trèfle à quatre feuilles qui avait porté chance aux Alfa Romeo de course dans les années 20. Afin d’épauler une augmentation de puissance relativement importante, des modifications de détail font perdre environ 100 kg à la voiture. Deux phares AV ont été retirés – le couple central ayant été remplacé par une grille –, les jantes en alliage Campagnolo, et les pare-chocs se sont débarrassés de leur banane. L’habitacle, revu par Zagato, se renouvelle : des baquets font office de sièges avant, le volant est à trois branches, le combiné arbore trois instruments ronds, la partie face au passager est plus sommaire – tout comme les contre-portes –, le levier est fixé au plancher et le frein à main, initialement sous le tableau de bord, est à présent positionné entre les sièges. Si les premiers exemplaires accueillent des tambours avec trois mâchoires à réglage automatique à l’avant, à partir de septembre, lorsque la production débute réellement, la Ti Super passe aux quatre disques. Plus puissante et allégée, la Quadrifoglio voyage à 189 km/h quand la Ti bloque l’aiguille de son tachymètre sur 169. Petit “écueil”, elle coûte un bras : 2,62 millions de lires, soit quasiment le prix d’une berline 2600 et 62 % de plus qu’une Ti. Le remplacement du couple interne de phares par des grilles permet, à gauche de refroidir le collecteur d’échappement, à droite d’augmenter le débit d’air vers les carburateurs. Autres éléments spécifiques à la Ti Super : des pare-chocs sans bananes pour limiter le poids et un monogramme identique à celui monté à l’arrière.
Vous n’êtes pas dans une berline, mais dans une auto de compétition : les sièges baquets possèdent un dossier fixe avec peu de rembourrage, mais leurs rebords les rendent suffisamment enveloppants. Si sa carrière commerciale se révèle plus que modeste puisqu’elle reste en production seulement un an et demi et s’éclipse du catalogue dès avril 1965, sa carrière sportive est en revanche brillante : déjà en 1963, dans l’attente de l’homologation dans la catégorie Tourisme (qui arrivera le 13 janvier 1964), des particuliers l’engagent dans des compétitions sur piste, en course de côte ou dans les rallyes. Les préparateurs qui s’exercent sur les Quadrifoglio sont parmi les plus réputés du milieu :
Samuele Baggioli, Almo Bosato ou Virgilio Conrero. Lors de la Coppa Intereuropa 1964 de Monza, les trois Ti Super de Ernesto Prinoth, Roberto Bussinello et Ugo Bagnasacco dominent leur classe. Des Alpes à la Sicile, ces autos réalisent de belles performances à la Trieste-Opicina, la CesanaSestrières et la Catane-Etna. Sans oublier les deux Français, Fernand Masoero et Jean Maurin, qui remportent leur catégorie et finissent quatrième au scratch derrière trois Ferrari 250 de 3 litres lors du 12e Tour de France Auto de septembre 1963. L’année suivante, Andrea De Adamich gagne la Coppa d’Autunno et Giancarlo Baghetti la Coppa Europa, toutes deux courues sur l’autodrome de Monza. Bien que souvent mise en difficulté par les Ford Cortina Lotus, la Quadrifoglio poursuit son existence jusqu’en 1966 en France, Belgique, Allemagne, Pays-Bas, Etats-Unis, Brésil, Argentine et Australie.
La Ti Super possède des suspensions abaissées, mais Alfa Romeo n’a jamais indiqué la différence de garde au sol entre elle et la Giulia Ti. Comme sur n’importe quelle Giulia, la boîte est tout simplement parfaite. Elle est bien étagée (les rapports sont identiques à la Ti), très bien guidée et les mouvements du levier sont courts et rapides. La direction est tellement précise qu’on la croirait à crémaillère. L’auto est également très bien freinée : ses quatre disques Dunlop associés à un servofrein (licence, justifiée, du propriétaire) sont rassurants et faciles à haute vitesse. Elle avale les courbes avec la plus grande rapidité et sans le moindre sous-virage : lorsque l’on file à une vitesse... de Giulia, elle reste neutre. Si on lui demande d’être une Quadrifoglio, elle part fougueusement de l’arrière et il faut alors oublier les freins et piloter sur les gaz en corrigeant au volant.
Cette voiture châssis AR 595203 de couleur extérieure : Biancospino elle est équipée de «Freni a disco» a été vendue neuve en France par la S.O.F.A.R. le 19 février 1964 à un amateur de Nice (517 MR 06). Elle connait un second propriétaire dans le Var le 14 aout 1969 (2471 QC 83). Restée dans le Var, elle est acquise par Monsieur DALMASSO le 14 aout 1969. Elle arrive dans la région Parisienne le 29 septembre 1972, aux mains de Monsieur Charles LEANDRE (1068 YP 75). Elle trouve nouvel acquéreur dans les Yvelines le 13 aout 1973 (7572N JX 78), en la personne de Monsieur JIMENEZ (employé SNCF). C’est à cette époque que l’actuel propriétaire croise sa route quand elle est reprise par le garage Sté NOUVELLE M.S.S.A. le 19 janvier 1976 dont il est collaborateur, pour être revendue au pilote Fernand MASOERO le 10 juillet 1976 (certificat « trois volets » pas de transfert de carte grise). Elle est acquise par l'actuel propriétaire en septembre 1999. Jamais molesté, et extrêmement d’origine, la voiture a été depuis ces nombreuses années aux bons soins de professionnels reconnu, c’est en effet Gerard LANVIN de LOV Auto qui en refera le moteur il y a 10 ans, ces sièges baquets si spécifique a la marque ont quand a eux été restauré il y a quelques année, dans du tissu d’origine. Jamais accidenté, possédant encore tous les attributs d’origine, volant, corne d’admission, parechocs logoté Alfa Romeo, jantes magnésium d’origine livrées a côté.
Il est rare de trouver de nos jours une Alfa Romeo Ti Super si bien conservé.
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